Jeudi 30 septembre 2021 / DE : RÉVOLUTION ÉCOSOCIALISTE
Ce rapport a servi d’introduction à la discussion sur la situation internationale tenue à l’AG de Révolution écosocialiste le 12 juin dernier.
Ce texte a été écrit par Bernard Rioux
Ce rapport a servi d’introduction à la discussion sur la situation internationale tenue à l’AG de Révolution écosocialiste le 12 juin 2021..
1. Le système capitaliste est porteur de chaos et de catastrophes qui se multiplient manifestant le caractère systématique de cette crise :
la crise économique démontre l’incapacité capitaliste à satisfaire aux besoins les plus élémentaires de l’ensemble de l’humanité alors que la classe dominante concentre de plus en plus de richesses entre ses mains ;
la détérioration de l’environnement conséquence de la logique même de l’accumulation capitaliste remet en question l’habitabilité de la terre par les humains et les différentes formes du vivant. La montée des gaz à effet de serre et le dérèglement climatique qui en découle provoquent la multiplication de phénomènes climatiques extrêmes ;
L’effondrement de la biodiversité est le produit d’un rapport capitaliste de prédation à l’environnement et de la soumission de la nature à cette logique. Le développement des zoonoses porteuses de la possible multiplication de crises sanitaires comme la COVID-19 est le produit direct de ce type de rapport à la nature ;
Le capital tente de plus en plus ouvertement à prendre le contrôle de la gestion de la crise écologique et de la soumettre aux impératifs de la finance. Depuis des décennies, les scientifiques appellent à l’urgence d’agir, mais les capitalistes et les États à leur service refusent de donner la priorité à cette lutte. Face au caractère de plus en visible du basculement climatique, les dirigeants capitalistes développent une démagogie de verdissement au mépris de toute vérité.
Incapable de se sortir d’une logique de la croissance, leurs perspectives sont une course en avant vers la révolution numérique s’appuyant sur l’extractivisme, l’intelligence artificielle et le génie génétique qui va nous conduire à l’épuisement des ressources et à la détérioration encore plus dramatique de l’environnement.
2. Pour imposer leurs solutions, la bourgeoisie de façon inégale et combinée est conduite à un durcissement de ses formes de domination et fait le choix de plus en plus évident des moyens de guerre civile pour préserver sa domination au mépris de toute forme de démocratie
la coercition policière et militaire est renforcée et des législations de plus en plus répressives conduisent à la criminalisation des mouvements sociaux.
La mise en place d’un capitalisme de surveillance numérique pour contrôler toute opposition et l’espionnage généralisé est une tendance majeure qui se manifeste par la mise en place de la surveillance des quartiers et par l’utilisation de systèmes de géolocalisation et de drones…
3. Le capitalisme est plus que jamais un système fauteur de guerres. Le développement des conflits pour l’établissement l’hégémonie économique et politique sur les différentes régions du monde est en cours :
Cet objectif de l’impérialisme conduit à la montée des investissements militaires avec le développement de la technologie des armes nucléaires afin de préparer des opérations guerrières.
Des manoeuvres de plus en plus agressives (économiques, politiques, militaires et idéologiques) sont menées contre la Chine et la Russie avec la montée des dangers de guerre nucléaire à la clé.
Les tentatives de la Russie (rôle au Proche-Orient) et de la Chine (stratégie de la route de la soie) démontrent leur volonté d’étendre leur domination sur certaines régions du monde qui peut conduire à des affrontements avec les forces impérialistes réunies dans l’OTAN.
4. L’approfondissement de la gestion néolibérale du capitalisme place la production sous le contrôle des grandes entreprises et du capital financier en favorisant la privatisation généralisée de tous les secteurs qui étaient parvenus à s’extraire de cette logique ; les systèmes de santé et d’éducation ont été affaiblis ce qui a été démontré par leurs difficultés à faire face à la crise sanitaire :
Le capital continue dans cette période d’épuisement des ressources à développer la consommation de masse par tous les moyens (de la publicité au développement de l’obsolescence planifiée) ;
Cet élargissement de la privatisation conduit le capitalisme dans sa phase néolibérale a tenté de détruire tous les acquis de l’État social et à affaiblir les organisations de la classe laborieuse ;
Le renforcement de la domination patriarcale est instrumentalisé pour renforcer les différentes formes de la surexploitation des femmes (précarité, iniquité salariale, maintien des ghettos d’emplois) et pour en rester à la simple rhétorique dans la lutte contre la violence faite aux femmes. L’offensive contre le droit à l’avortement est aujourd’hui généralisée à de nombreux pays ;
L’oppression nationale et coloniale sert de justification aux politiques de prédation et au maintien des nations autochtones dans des conditions de misère. La domination sur les populations racisées est d’autant plus exacerbée que ces populations sont ciblées comme des ennemis de l’intérieur. Le développement de l’islamophobie est éloquent à cet égard ;
Le développement la lutte idéologique et politique contre les différentes figures de l’opposition à la domination capitaliste (le socialisme, le planisme, le collectivisme, le syndicalisme, la souveraineté populaire, l’égalité de genre, l’antiracisme) crée des conditions de la montée de l’extrême-droite et des partis fascistes dans toutes les régions du monde.
5. Face à cette offensive capitaliste, patriarcale et coloniale, la résistance sociale s’est déployée partout dans le monde.
Les luttes contre la vie chère, contre les inégalités sociales, contre les politiques d’austérité et pour de meilleurs accès aux services publics se sont développées ;
Ces mouvements ont pris la forme de rejet des pouvoirs autoritaires et corrompus (Chili, Colombie, Liban, …) Ces luttes ont également affirmé la volonté de la majorité de rejeter les pouvoirs autoritaires, la corruption et démontré une volonté du renforcement des droits démocratiques (nécessité de la redéfinition démocratique des institutions — la lutte pour la constituante au Chili par exemple. La remise en question de l’oppression nationale des peuples autochtones et les luttes antiracistes ont été parties prenantes de ces combats. Le mouvement Black lives Matter a porté cette lutte à des sommets inégalés ;
La compréhension de plus en plus profonde des enjeux de la crise climatique a donné lieu à des mobilisations massives de la jeunesse. Des millions de personnes sont descendues dans les rues en 2019 tout particulièrement ;
Ces différents mouvements ont pris la forme de manifestations monstres, d’occupations de places (Tahrir, Occupy Wall street, mouvement étudiant au Québec et au Chili, occupations des villes en Espagne, montée des Gilets jaunes en France, mobilisations massives au Liban, luttes des femmes en Amérique latine et sur tous les continents avec le développement de grèves des femmes, luttes paysannes et grèves générales en Inde…
Il y a eu une véritable montée des mouvements de masse de 2011 à 2020 sur ce terrain. Et elle continue de s’exprimer au-delà de la crise sanitaire qui a marqué, certes, un temps d’arrêt, mais ces luttes continueront à se développer.
6. Ces mouvements de résistance marquent le surgissement d’un combat interclassiste et citoyen contre les élites néolibérales et antidémocratiques, mais ils n’arrivent pas à dépasser jusqu’ici ses limites politiques.
Ils s’inscrivent d’abord dans un cadre national — drapeau national est souvent leur emblème (même si les mouvements féministes et écologistes portent déjà la nécessité d’un combat internationaliste. )
Ils ne s’inscrivent pas dans la stratégie historique qui a structuré l’action des mouvements ouvriers et révolutionnaires du 20e siècle. Cette réalité s’explique par l’évolution des partis présentant ces récits historiques (social-démocratie, stalinisme, national-populisme, syndicalisme réformiste ) qui ont rejoint une orientation social-libérale puis ont assumé complètement le néolibéralisme. Et c’est contre ou en ignorant ces partis que les mouvements se sont construits et ont favorisé des organisations horizontales, sans organisations politiques dirigeantes cantonnant les partis politiques de gauche et les syndicats traditionnels dans un rôle marginal.
Les gains arrachés par ces mouvements de masse n’ont pas réussi à remettre en cause durablement la domination de la bourgeoisie, et n’ont pas permis jusqu’ici l’émergence et la consolidation à une large échelle de nouvelles forces anticapitalistes organisées offrant un débouché politique capable de renforcer ces mouvements et de poser une stratégie de conquête du pouvoir et de construction d’un système alternatif au capitalisme.
7. Pour répondre à la situation, la gauche écosocialiste comme pôle international doit poser la nécessité de construire des fronts politiques édifiés à partir des luttes sociales contre toutes les formes d’exploitation capitaliste et d’oppression de genre et de race pour lutter pour l’égalité et la démocratie sociale véritable.
Nos tâches avec les écosocialistes du monde entier sont de débattre et d’élaborer des réponses programmatiques à la crise systémique du capitalisme avec les protagonistes actifs dans les divers mouvements de résistance au niveau local, national et international afin de construire des fronts politiques entre l’écologie, le syndicalisme, l’altermondialisme, le féminisme et l’antiracisme en intégrant les revendications et les combats de chacun de ces mouvements dans leur dynamique intersectionnelle. L’internationalisme politique doit être partie prenante de notre combat. Car une telle perspective permettra de faire avancer la perspective révolutionnaire et poser la question du pouvoir populaire. Pour permettre la concrétisation d’une telle orientation, la collaboration avec les organisations écosocialistes partageant cette perspective doit être concrétisée.