Conseil national de Québec solidaire, mai 2024

Un premier bilan du Conseil national de Québec solidaire

André Frappier -  Le Conseil national s’est déroulé dans un climat tendu à cause du non-dit sous-jacent aux propositions soumises par la direction de QS tant à propos de la déclaration de Saguenay que la révision du programme.
5 juin 2024

 Ce constat est tellement évident, même les médias parlent clairement de recentrage pour écarter les positions de gauche. Il y a une conception stratégique derrière la déclaration de Saguenay et la réécriture du programme, c’était l’éléphant dans la pièce. Les membres délégués méritaient que la direction de QS fasse preuve de limpidité, ça n’a pas été le cas et cela a alimenté les tensions.

Le Conseil national de février 2023 avait pris acte de la nécessité de renforcir la présence de QS en région et avait décidé de lancer « une tournée de mobilisation et de consultation dans les régions du Québec, afin de consulter les membres solidaires de ces régions, la population québécoise, la société civile et les mouvements sociaux, pour mieux enraciner le projet solidaire dans la réalité de l’ensemble des régions. » Il avait été décidé « que les résultats de cette tournée soient soumis aux membres lors d’une future instance nationale. »

Or, il n’y a pas eu de rapport. Rien qui indiquait quelles régions ont été visitées, quels groupes on a rencontré, quelles préoccupations elles ont soumis et quelles ont été nos réponses. Est-ce qu’on a tenté d’expliquer les motifs qui soutiennent nos positions ? Quelles étaient les difficultés rencontrées ?

La déclaration de Saguenay ne contenait aucun élément de rapport qui aurait pu nous mettre sur la piste des motifs qui soutenaient les propositions avancées dans le cahier. Il fallait faire un acte de foi. Ce travail aurait été pourtant essentiel et respectueux.

On aurait ainsi pu regarder ensemble les constats de la tournée, en tirer des conclusions sur ce qui doit être fait pour mieux rejoindre les préoccupations en région et mandater le prochain congrès pour en disposer. Cela aurait été un exercice collectif beaucoup plus rassembleur et correspondant au mandat d’un CN : organiser la discussion du congrès.

La révision du programme

On nous a imposé au pas accéléré un texte de révision programmatique qui contenait en plus des changements aux politiques de notre programme et de nos plateformes antérieures en ce qui a trait à l’industrie forestière et notre position en agriculture concernant l’UPA. Comment la direction de QS ne pouvait-elle pas s’attendre à une résistance ? Au lieu de composer avec les membres, on a senti la direction en affrontement contre ceux et celles qui questionnaient ses propositions d’orientation.

Certaines propositions adoptées ont permis de sauvegarder des éléments importants et de permettre un échéancier un peu plus long, – comme le retrait de l’appui au monopole syndical de l’UPA, le choix clair du CN de rejeter la proposition principale de “modernisation” du programme entendu comme une refonte totale – en faveur plutôt de sa réactualisation entendue comme une mise à jour ciblée.

Cependant la proposition pour que le programme soit exempt d’engagements politiques trop spécifiques a été adopté. À quoi peut-on maintenant s’attendre maintenant dans cette révision du programme sinon qu’elle efface les éléments trop revendicateurs ? On en a eu un aperçu avec la déclaration de Saguenay concernant la reconnaissance du rôle central de l’industrie forestière stipulant « qu’un gouvernement solidaire va adopter une stratégie d’adaptation des forêts aux changements climatiques, en collaboration avec les communautés touchées et l’industrie. »

Le programme actuel stipule que : « En plus du secteur minier, Québec solidaire préconise de placer la grande industrie forestière sous contrôle public (participation majoritaire de l’État) en envisageant, au besoin, la nationalisation complète. »

Avant de procéder à un changement de cap aussi important, il serait approprié de faire une étude un peu plus approfondie concernant les bénéfices de la nationalisation par rapport aux subventions gouvernementales faramineuses accordées au fil des ans à cette industrie. Il nous semble que c’est un minimum de rigueur.

La direction de Québec solidaire nous amène ainsi bien en deçà de ce que René Lévesque avait préconisé concernant une de nos ressources naturelles importantes, la nationalisation de l’hydroélectricité.

André Frappier
28 mai 2024